Fumée de chauffage au bois

La santé des résidants des régions à risque

L’exposition à la pollution provenant du chauffage résidentiel au bois a un effet plus dévastateur sur la santé des résidants des régions que celle provenant du transport routier ou des industries. Le constat d’une nouvelle étude de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) est tel qu’il recommande aux municipalités en périphérie des grands centres de durcir la réglementation sur les appareils de chauffage.

Sara ChampagneLa Presse

Ce qu’il faut savoir

En 2023, un bilan rendu public par Santé Canada a révélé que les particules fines provenant de la combustion résidentielle provoquent plus de décès prématurés au Québec que tous les autres polluants.

Au Québec, depuis 2009, tous les appareils de chauffage en vente doivent être certifiés EPA ou CSA, pour émettre moins de particules fines.

Entre 2015 et 2020, la norme au Québec est passée de 4,5 grammes de particules fines par heure à 2,5 g/h.

Les particules fines (PM2,5 microns de diamètre) dans l’air sont les grandes coupables, été comme hiver.

À la demande du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP), des chercheurs de l’INSPQ ont modélisé l’impact annuel des polluants de l’air dans huit secteurs : Québec-Limoilou, Sherbrooke-Estrie, Trois-Rivières et Bécancour, Sorel, Saint-Hyacinthe, Témiscamingue, Rouyn-Noranda et Saguenay. Même si le contrôle des émissions provenant des industries demeure nécessaire, la diminution des émissions causées par le chauffage résidentiel au bois serait « plus bénéfique sur les populations », conclut le centre d’expertise et de référence en matière de santé publique au Québec.

https://da57015711faef6182636d702c586af6.safeframe.googlesyndication.com/safeframe/1-0-40/html/container.html

« Localement, la combustion résidentielle au bois (PM2,5) continue d’être responsable de la moitié de la pollution dans l’air », a résumé en entrevue avec La Presse la chercheuse principale de l’étude, Audrey Smargiassi, de la Direction de la santé environnementale au travail et de la toxicologie du Québec, également professeure titulaire à l’Université de Montréal.

Le rapport de recherche de l’INSPQ, publié en décembre 2023, a été produit à la demande du MELCCFP. Il a été obtenu par La Presse en vertu de la loi sur l’accès à l’information. À travers divers graphiques, les experts décortiquent des scénarios d’émissions issues du chauffage résidentiel au bois, de son abolition, et l’élimination des émissions associées à l’agriculture, aux véhicules hors route et aux activités industrielles. Les données analysées sont tirées d’imageries satellitaires et de mesures de stations d’échantillonnage.

Réduction possible

L’équipe de chercheurs a constaté qu’il serait possible de réduire de 30 % les concentrations journalières moyennes de PM2,5 s’il y avait un virage généralisé vers des appareils certifiés de type EPA (pour l’Environmental Protection Agency des États-Unis). Seul le Témiscamingue aurait une réduction moins prononcée, évaluée tout de même à 15 %, indique-t-on.

« L’impact sur la santé des particules fines est démontré depuis longtemps. Le chauffage au bois contribue aux risques. En le réduisant, on va effectivement améliorer la qualité de l’air. Je vous dirais que même en éliminant complètement le chauffage résidentiel au bois, il demeurerait dans l’air 50 % des particules fines en région », précise l’experte Smargiassi.

Les particules voyagent avec les masses d’air. Elles peuvent provenir de sources très lointaines, par exemple du transport dans les grandes villes américaines ou du nord de l’Ontario.

 Audrey Smargiassi, chercheuse principale de l’étude

Chemin faisant, les experts ont analysé les décès associés à l’exposition chronique aux PM2,5 dans les huit secteurs ciblés. Ils ont étudié d’autres effets associés, comme les symptômes respiratoires de l’asthme, de la bronchite chronique chez l’adulte et aiguë chez l’enfant, les visites aux urgences et les hospitalisations pour des problèmes respiratoires et cardiaques. À l’instar d’un rapport de Santé Canada, les chercheurs concluent que les taux de mortalité annuels associés à l’exposition chronique aux particules fines provenant de la combustion au bois sont plus élevés en région que ceux liés aux autres polluants (O3, NO2 et SO2), entre autres le dioxyde de soufre provenant de la combustion fossile.

À Montréal et à Laval, il est interdit d’utiliser un appareil émettant plus de 2,5 grammes de particules par heure. La Ville de Québec a emboîté le pas cette année en obligeant les propriétaires de poêles à bois et de foyers à les enregistrer. À partir de septembre 2026, seuls les appareils certifiés seront permis. À partir de 2030, la capitale nationale interdira d’utiliser des foyers d’ambiance.

« La certification n’est pas une panacée »

Ailleurs au Québec, la réglementation en matière de poêles à bois demeure permissive. Les villes de Sherbrooke, Trois-Rivières, Sorel, Saint-Hyacinthe, Témiscamingue, Rouyn-Noranda et Saguenay ont confirmé qu’il n’y avait pas de certifications obligatoires des appareils.

À la Ville de Saguenay, par exemple, le conseiller aux communications, Dominic Arseneau, a expliqué que le chauffage au bois est « totalement permis », mais qu’il y a des « normes de sécurité » émises par le service d’incendie régional à respecter.

À Trois-Rivières, la direction des communications a précisé par courriel qu’elle « n’a pas adopté de réglementation spécifique puisque les normes de fabrication et d’utilisation des appareils combustibles au bois relèvent des gouvernements, et que l’installation est encadrée par le Code du bâtiment ».

Daniel Vézina a fondé le regroupement Familles pour l’air pur. « Nous sommes un petit groupe, l’enfant pauvre de l’environnement », estime-t-il. Selon lui, il faut se poser des questions sur la norme sociale à normaliser les feux de foyer intérieur pour l’ambiance et les feux de camp en été.

« La certification n’est pas une panacée, dit-il. Les nouveaux foyers au gaz polluent aussi. On devrait subventionner le retrait des anciens appareils. Je peux comprendre l’attachement émotif des gens, mais il faut comprendre les enjeux sur la santé. »

Avec la collaboration de William Leclerc, La PresseConsultez les travaux et recherches de l’INSPQ sur la qualité de l’airConsultez les effets de la pollution de l’air sur la santéLisez le rapport sur les impacts sur la santé de la pollution de l’air au CanadaConsultez le site du regroupement Familles pour l’air pur

Avatar de Inconnu

À propos de leptitjournaldunet

Journaliste indépendant qui se donne pour mission d'informer les aînés par un contenu écrit ainsi que par des diaporamas incitant les aînés à sortir et ainsi briser l'isolement.

Publié le 19 août 2024, dans Non classé. Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.

Laisser un commentaire